mercredi 30 mars 2011

Ces chers disparus que j'ai oubliés

« Tu te rappelles de la jeune dame aveugle qui venait souvent, qu’est-ce qu’elle est devenue ? » a demandé Corinne au patron de l’Amandine, hier. Il nous a donné des nouvelles, elle est séparée de son mec, un mal-voyant, aussi, un type d’une laideur abominable, ivrogne, braillard. Haïssable, donc…

Ils m’étaient complètement sortis de l’esprit.

En sortant du bistro, pour revenir à la Comète, j’ai croisé une vieille dame, en vélo. Elle m’a rappelé une autre vieille dame, qu’on voyait passer tous les soirs, relativement tard, à l’époque où je trainais à l’Aéro.

Alors, je me suis rappelé de la « comptable », une autre cycliste, une femme avec les cheveux très noirs et très longs, qui s’asseyait en terrasse de la Comète avec un cahier dont elle remplissait des pages et des pages. C’est le gros Loïc qui avait demandé à Jean, le patron : « C’est ta comptable ou quoi ? » Jean a fini par la virer pour une raison que j’ai oubliée précisément (mais la cliente était du style à monopoliser une table pendant deux heures pour un café et à faire la gueule au moment où la serveuse lui demandait de bouger, à la fermeture, pour qu’elle puisse passer la serpillière).

La première cycliste m’a également rappelé un vieux monsieur qui passait tous les soirs, plus récemment, promenant en laisse une espèce de fox-terrier, aussi périmé que le maitre, mais qui visiblement n’avait pas envie de se promener. Alors le maitre tirait sur la laisse pour forcer le chien à bouger et nous nous mettions à la porte, pour le regarder, mi attristés, mi rigolards.

Ce qui est très fort.

Mais ce qui est très fort, surtout, c’est l’idée qui m’est passée par le crâne, hier soir, en arrivant à la Comète : faire un billet de blog à propos de tous ces gens qui ont rythmé mes soirées, pendant une époque, et que j’ai oubliés.

Mais comment faire un billet si je les ai oubliés ?

Combien sont-ils, ces chers disparus ?

(photo)

4 commentaires:

  1. Cela me rappelle l'émission "Que sont-ils devenus" qui suivait une classe de 6ème pendant des années.

    On est tous amené à disparaître les uns des autres.

    Disparitus

    RépondreSupprimer
  2. Oui, mais ce qu'il y a de spécial c'est que je les avais totalement oubliés et j'y ai pensé par hasard.

    Je me suis rappelé des deux premiers parce qu'on en a parlé devant moi et des trois suivants à cause de la dame en vélo et parce que je pensais à ces disparus, que j'ai j'essayais de m'en rappeler...

    RépondreSupprimer
  3. C'est vachement touchant, Nicolas, tes chroniques de "village" parisien, parce que ça ressemble à un peuple de village,à une humanité plus trop en état de marche peut-être, mais bringuebalant dans le courant de la vie comme elle peut.
    Tous ces gens, à nos yeux, sont bien réels, j'en ai croisé des tas dans le Morbihan où je vivais enfant et adolescent, et à Rennes depuis.
    Ils trimballent leur connerie comme leur humanité, dans une sacoche rapiécée, pour la plupart.
    Tout ces gens qui rament, qui rient, qui crient parfois, l'œil noyé de pif, et qu'on entend pas, qu'on écoute même plus ("ce que leurs pauvres mains racontent" comme disait Brel).
    Tous ces gens qui vivent et qui aiment comme ils peuvent, c'est à dire généralement mal et bien souvent n'importe comment .
    Avec ce que le rythme effréné du monde leur laisse parfois comme miettes.
    Joli, et touchant, pas eu le loisir de te le dire, mais je te le dis. Sincèrement.

    RépondreSupprimer
  4. MHPA,

    Merci... Ce qu'il y a de bien, dans le fait de rester au comptoir, c'est qu'on peut regarder les gens passer...

    RépondreSupprimer

La modération des commentaires s'active automatiquement deux jours après la publication des billets (pour me permettre de tout suivre). N'hésitez pas à commenter pour autant !