jeudi 3 janvier 2013

L'évolution du web politique

Nul ne sait comment évoluera la politique sur le web au cours des prochaines années. Tout ce qu'on peut constater c'est une différence de positionnement entre la gauche et la droite d'une part et l'évolution de la presse traditionnelle vers le web d'autre part parce que tout le monde sait que la presse politique papier est condamnée : c'est plus facile de lire un journal sur une tablette tactile... En outre, Twitter a provoqué beaucoup de changement dans "notre petit monde d'observateurs".

Que vont devenir les fournisseurs de "contenus militants" ?

Au fond, mes lecteurs le savent, je suis plus intéressé par les blogs que par la politique. D’ailleurs, mon blog politique s’en ressent : je fais plus de billets à propos des blogs que de la politique. Et parfois, je fais semblant de faire un billet politique. Ce matin, j’ai fait un billet pour défendre la tenue vestimentaire de François Hollande uniquement pour voir dans quelle direction allaient les commentaires. Cela n’a pas loupé : des twittos de droite n’ont pas loupé de « s’indigner » sur le thème : « Il est prêt à aller jusqu’à où pour défendre François Hollande. »

Ils n’ont pas vu, d’une part, que mon billet était strictement humoristique et, d’autre part,…

Heu… Si mon billet était sérieux, il faut quand même bien dire que François Hollande n’est pas assez inélégant pour ne pas faire Président de la République et que la majorité des Français, dont moi, se foutent totalement d’une cravate de travers. Du coup, il y en a un qui a même avoué fouiller dans mes archives pour trouver tout le mal que je pouvais avoir dit à propos de Nicolas Sarkozy, à un niveau physique. Pas de bol, ils rentrent vierge et auraient du lire mon billet de la veille où j’appelle à un peu de respect dans les blogs et où je rappelle que je n’ai jamais critiqué Nicolas Sarkozy sur son physique.

Peu importe cette anecdote. Il n’est pas difficile d’observer que le débat politique dans la blogosphère a bien été transformé depuis quelques temps. Comme je suis avant tout blogueur, ça me préoccupe.

Première partie : où mes copains blogueurs sont préoccupés

FalconHill tirait récemment un sombre bilan de son année 2012 de blogage. Je l’ai largement repris dans mon blog politique. Marco le reprend également ce matin : « Je comprends le sentiment désabusé du Faucon, renforcé par le fait que ses idées et ses souhaits pour la société soient maintenant relégués au second plan alors qu’elles sont incontestablement empreintes d’humanisme et de bon sens. Je serai très déçu s’il renonçait. » « Et je partage avec lui la perte de cet esprit de famille qu’était la blogosphère dans son ensemble. »

Je ne suis pas sûr que Marco ait totalement raison. Le Faucon est un copain. Je ne suis pas son porte parole mais je crois pouvoir dire que « ses idées et ses souhaits pour la société » n’étaient pas portés par l’UMP et « la Sarkozie ». Ils ne sont donc pas « maintenant relégués au second plan ». Je ne sais plus quel commentateur disait chez moi que la droite française est morte au niveau de la représentation politique. Néanmoins, Marco a raison sur un point : la gauche étant maintenant au pouvoir, ce sont maintenant les idées de gauche qui font débat.

Deuxième partie : où les blogs de droite sont nuls

La gauche est au pouvoir mais les blogs de gauche restent ultra dominants (voir l’article du Monde de l’autre jour) et il n’y a aucune raison que ça change alors qu’on aurait pu l’espérer. C’était un peu l’idée d’un de mes récents billets du blog politique. Je vais le résumer : les blogs de droite sont peu nombreux et ils ne mènent pas un vrai débat idéologique qu’ils soient d’opposition aux projets de la gauche ou de préparation d’un projet politique pour la droite.

Je ne vais pas refaire un billet à propos des blogs politiques de droite mais je vais prendre un extrait légèrement corrigé d’un billet récent d’un blog de droite (que je ne cite pas parce que je ne veux pas avoir l’impression de dénoncer, ce n’est pas mon souhait) qui reprend un de ses propres billets d’avril 2012, avant l’élection. Un blogueur politique de droite nous explique que « d'après un rapport validé par la Cour des Comptes, la moitié de l’augmentation du déficit public sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy était due à un endettement antérieur. » Un blogueur politique de gauche mettra cinq minutes à démontrer que, d’une part, la dette a aussi augmenté sous des gouvernements de droite antérieurs et que, d’autre part, la dette augmente de manière à peu près continue depuis une loi libérale faite par la droite en 1973.

Ce billet de blog – et plus précisément cet extrait – est totalement inutile. Pour un motif quelconque (de son choix, que je ne contestais pas), un blogueur de droite ressort un argument erroné qu’il sortait avant l’élection pour défendre Nicolas Sarkozy. Quel intérêt ? Ce blogueur met en avant les erreurs de la droite et tout ce qui aboutit à son échec (en tant que blogueur de gauche, j’aurais tendance à être beaucoup plus méchant, mais, dans ce billet, je ne serais pas dans mon rôle).

Troisième partie : où les blogs de droite n’ont pas de contenu

Vous pouvez prendre n’importe quel blog de droite, en dehors des « purs réacs » et des « purs libéraux », soit des blogs susceptibles de soutenir réellement l’UMP… Vous trouverez des contenus rigolos, des critiques de forme sur le Gouvernement et le Président mais aucun contenu réellement politique depuis des mois.

J’en connais qui vont dire : nananère, vous à gauche, c’est pareil.

Je vais démontrer le contraire mais si ça vous gonfle, sautez directement à la conclusion de la troisième partie.

Je vais prendre des exemples au hasard. Le premier, moi. Le 20 décembre, un billet complet et argumenté sur la réforme bancaire qui en suivait un premier. Aucun des deux n’est réellement pro-gouvernement et ne va dans la tendance gauchiste à la mode. Un billet le 19, hors actualité, à propos de l’aménagement du territoire et de la Défense. Le 18, je faisais un billet à propos de la réforme des retraites. Le 13, un billet à propos du Grand Paris juste après un billet à propos de la fracture numérique. Le 12, un billet sur la sociologie électorale. Au mois de décembre, mois de faible actualité politique, il y a chez moi 6 billets (je supprime celui sur la sociologie électorale) avec du débat de fond (j’ai fait d’autres billets de fond mais qui ne portent pas sur la politique et d’autres billets qui pourraient être catégorisées de politique politicienne). Voyons mes confrères. Je passe les illustre Seb Musset et Romain Blachier qui sont des gros bosseurs (mais je n’ai pas accès leurs blogs) tout comme Sarkofrance (son annexe est un blog d’humeur alors que je fais tout sur le mien et son blog principal est une chronique du quotidien). Je passe aussi les blogs de nos amis du Front de Gauche qui ont un vrai contenu idéologique (mais j’ai la flemme de les relire). J’en arrive à Politeeks, attention, ça va charger la barque. Le 29 décembre, un billet expliquant pourquoi il faut revenir à l’imposition de 2000. Le 28, les réquisitions de logement. Le 27, un billet de fond antilibéral. Un billet de fond à propos du NAIRU (j’avais oublié ce truc là alors qu’il rebondit sur un de mes vieux billets…), le 26. Le 18 (j’ai sauté plusieurs jours, faut pas déconner non plus, je ne vais pas faire croire qu’il bosse plus que moi), un billet de fond pour critiquer la politique de François Hollande et un billet complet sur la fraude fiscale. Un billet complet sur la pauvreté le 13. Un billet de fond sur l’Education Nationale, le 9. Un billet pro gaz de Schiste (donc pas dans la tendance gauchisante…), le 7. Un billet détaillé sur Mittal, le 6. Le 4, un billet à propos du tunnel Lyon Turin (dans mes billets je n’ai pas comptabilisé celui de réponse que je lui ai fait, comme nous ne sommes pas d’accord, j’aurais du). Le 1er, un autre billet sur Mittal. Soit 12 billets, plus 6 chez moi. J’en arrive à Melclalex… Le 21, un billet sur la réforme bancaire et les promesses de Hollande. Le 7, un billet de comparaison Dexia vs. Veolia. Le 6, un autre billet à propos de Mittal. Trois billets en plus à ma liste (c’est un mois où il a beaucoup plus collé à l’actualité – le mariage pour tous, Mittal – et son soutien à Montebourg que sur les sujets de fonds comme il le fait habituellement, comme en novembre avec son long billet pour relater sa rencontre avec Mosco). Si je compte bien, ça nous fait 21 billets dont une partie qui va à l’encontre du Gouvernement ou n’a rien à voir avec l’actualité politique immédiate. 21 billets travaillés avec du fond politique, le tout dans trois blogs « en vue » (sachant que je n’ai pas pris en compte les trois plus gros auxquels je suis abonnés : Seb, Romain et Sarkofrance).

J’en reviens donc à mon billet. J’en étais à : « J’en connais qui vont dire : nananère, vous à gauche, c’est pareil. » Trouvez-moi dans la blogosphère de droite non purement libérale vingt billets de blogs avec un tel fond politique qui dépasse le stade « la cravate d’Hollande est de travers » ou « Depardieu est maintenant Russe à cause des communistes français » dans des blogs qui dépassent 100 ou 200 visiteurs par jour mais tenus par des gens qui ne sont pas cadres du parti. Je reviendrais à ce seuil de nombre de visiteurs plus tard si je pense.

Conclusion de la troisième partie et de la deuxième tant que j’y suis.

Les blogs de gauche et les blogs de droite sont bien différents. Les blogs de droite n’arrivent pas à produire du contenu qui dépasse le point de vue du blogueur sur tel ou tel sujet plus ou moins d’actualité.

N’y voyez pas une méchanceté de ma part. L’UMP a été dans l’incapacité pendant cinq ans de produire du contenu idéologique. Le Gouvernement précédent est revenu sur des mesures qu’il avait prises, il n’y a aucune lisibilité. Les blogs libéraux, eux, offrent un vrai contenu mais sont minoritaires et renient tout rapprochement avec l’UMP car l’UMP a montré qu’elle n’était capable que d’une politique interventionniste.

Par contre, la gauche a mené de nombreux débats depuis 2007 et les blogueurs de gauche ont été bien entraînés aux débats (le congrès de Reims, les machins internes au PS de Titine, les primaires… jusqu’à la « bataille » PS – FdG pour la Présidentielle et les législatives). En outre, étant cinq ans dans l’opposition, c’était assez facile de faire des billets argumentés et documentés sur beaucoup de sujets.

Quatrième partie avec la cartographie de la « politosphère »

Alors que les blogs de gauche, qu’ils soient plus ou moins proches ou éloigné du Gouvernement sont bien présents depuis « toujours », ne serait-ce que parce qu’il est beaucoup plus simple d’être dans l’opposition mais aussi parce que le type de gauche a probablement plus l’esprit « militant » et aime bien les débats internes.

Les blogs autour de l’UMP sont presque absents mais ils commencent à revivre un peu : ils sont dans l’opposition. Néanmoins, sur le Web, la droite est surtout présente via des machines comme Atlantico ou Opposition Républicaine (pour ne citer qu’eux, mais on pourrait ajouter Le Figaro qui, contrairement à ses homologues de gauche, a une ligne politique fidèle à une organisation politique).

Les autres composantes de la droite, à savoir les libéraux et la droite de la droite sont plus présents sur les blogs que l’UMP mais ont aussi des gros sites tels que, respectivement, Contrepoints et Fdesouche.

La gauche n’a pas l’équivalent de Atlantico, Opposition Républicaine, Contrepoints et Fdesouche (il me semble que j’en oublie un). Il y a bien des pureplayers plus ou moins à gauche et des gros agrégateurs mais ce ne sont pas des machines militantes comme les quatre que j’ai cité.

Conclusion de la quatrième partie que l’on cumule avec les précédentes

 Les physionomies du web à droite et à gauche sont radicalement différentes. A gauche nous avons des blogs militants et à droite des gros sites web d’information politique engagés.

Le journaliste qui est un peu couillon ne voit pas cette différence.

Il parlera de blogs pour tout.

Cinquième partie : où la sortie du classement Ebuzzing est importante

Si une brochette de plus ou moins gros blogueurs est sortie du seul classement de blog (mais aussi site d’information basé sur les blogs), c’est bien parce qu’il entretenait une confusion entre les blogs et les sites d’information.

Contrairement à ce que certains ont pensé, ce n’est pas un coup de colère.

Ebuzzing, pour des raisons qui lui sont propres et qu’il ne m’appartient pas de discuter à profondément modifié la cartographie du web politique. Nous ne nous en rendons compte que maintenant mais il est probable que l’évolution dure depuis longtemps, probablement fin 2010 ou début 2011 : il suffit de modifier discrètement les algorithmes… Les blogueurs ne peuvent pas lutter pour augmenter leurs nombres de « like » ou de « RT ». Seuls des professionnels pouvaient le faire.

Sixième partie : où il n’y pas que ça, quand même.

Je n’ai pas la prétention de décrire toutes les évolutions de la blogosphère politique. On a par exemple un certains nombre de confrères blogueurs de gauche qui se sont lassés ou qui n’ont pas su trouver leurs repères dans l’opposition. Les blogueurs de gauche avaient, auparavant, une cible commune : Sarkozy et l’UMP. Maintenant, ils sont beaucoup plus divisés.

Surtout, les deux dernières années ont été particulièrement éprouvantes.

Septième partie : où je retrouve FalconHill et Marco

Je citais Marco qui parlait de FalconHill en début de billet. « Et je partage avec lui la perte de cet esprit de famille qu’était la blogosphère dans son ensemble. » Je pourrais faire trois pages pour argumenter mais il me semble que mon billet est assez long et j’ai bistro.

Toutes les mutations de la blogosphère ont fait que l’esprit des blogs a changé.

Je vais citer quelques exemples :
-         des copains sont partis ou ont ralenti et nous avons eu la flemme de continuer à partir à la découverte d’autres blogs,
-         des visiteurs « venus d’ailleurs » sont arrivés. Alors qu’auparavant l’essentiel des commentaires de mon blog politique venaient d’autres blogueurs, souvent des copains, ils viennent maintenant de je ne sais où, ils sont hargneux (ils n’ont pas compris la différence entre les blogs et les sites d’information où ils avaient l’habitude de ronchonner dans les commentaires),
-         nous-mêmes sommes lassés.

C’est important. Prenons un type au hasard : moi. J’ai été pendant trois ou quatre ans number one du bazar. J’ai vite compris que ça ne servait pas à rien si ce n’est à me qualifier de gros blog. Ca lasse. Alors je continue à aller avec autant d’appétit vers mes copains blogueurs mais j’arrête d’aller encourager des glandus inconnus pour qu’ils me refilent des liens pour monter dans les classements. Ne répétez à personne cette dernière phrase. C’est un secret. La conséquence est que je ne m’ouvre plus autant qu’avant vers d’autres blogs.

Aparté : A propos des blogs UMP sans contenu, je parlais de ceux « qui dépassent 100 ou 200 visiteurs par jour » et j’avais promis d’y revenir. Je disais que les blogs ont peu de visibilité, surtout à droite où ils sont « recouverts » par les quatre gros sites dont je parlais. A gauche, nous avions de la visibilité « grâce au Wikio » et le copinage aidant, nous pouvions envoyer et promouvoir des petits blogs. Ainsi, nous pouvions donner ne serait-ce que l’illusion d’une influence. Un petit blog militant de droite a beaucoup moins d’espoir d’avoir de la visibilité… Il est facile de produire du bon contenu mais, pour le faire connaître dans les blogs, il faut faire du réseautage social. C’est l’essence du blogage ! Le blog politique qui se veut être une tribune politique et qui reste avec peu de visiteurs ne reste qu’une tribune, ce qui ne retire rien à sa qualité et à son statut de blogs. J’espère que je me suis bien fait comprendre…

Conclusion :

Nous avons quatre défis majeurs, sur l’internet.

Je me fous du premier : les blogueurs UMP auraient intérêt à se bouger le cul s’ils veulent exister.

Le deuxième : faire en sorte que le contenu « de fond et de qualité » qu’on sait produire dans nos blogs de gauche (en moyenne un ou deux billet par semaine ?) soit plus visible que les trucs bidon qui ne valent pas l’éditorial d’un journal local.

Le troisième : faire en sorte que le web de gauche soit plus visible que le web de droite qui dispose de médias industriels tels que Contrepoints, Atlantico, Fdesouche et Opposition Républicaine.

Le quatrième, le plus important : retrouver le plaisir de bloguer, ce qui ne peut se faire que dans le réseautage social plus que dans le militantisme. Retrouver le blogage avec les copains.

8 commentaires:

  1. Retrouver le plaisir de bloguer, oui !!

    RépondreSupprimer
  2. Falconhill, Bembelly, Disp,

    Oui.

    RépondreSupprimer
  3. Moi, je me souviens d'un type (mais c'était il y a vachement longtemps) qui, dans ses conseils aux jeunes blogueurs, disait : « Ne faites pas de billets trop long, personne ne les lira jusqu'au bout. »

    Me d'mande c'qu'il est dev'nu, çui-là, tiens…

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Z'avez raison le vieux. C'est pour ça que le fais dans mon annexe et pas dans PMA. Une ruse de sioux. Les andouilles auront du mal à casser mon billet de PMA puisque tout est "démontré" ici. Et les andouilles qui ne sont pas d'accord avec mon truc sur les blogueurs de droite incapables de fournir du contenu précis et complet seront coincés avec le présent billet.

      Tout ce qu'ils vont faire c'est perdre du temps à faire des billets trop longs pour etre lus dans leurs blogs principaux pour démontrer que j'ai tort sans y arriver.

      On s'amuse comme on peut et je n'ai pas grand chose à glander au bureau en cette période.

      Supprimer
  4. Vous êtes combien à bloguer ici bordel de bordel?

    RépondreSupprimer

La modération des commentaires s'active automatiquement deux jours après la publication des billets (pour me permettre de tout suivre). N'hésitez pas à commenter pour autant !