mercredi 20 octobre 2010

Retraite et démographie : moi aussi, j’accouche des chiffres

Coïncidence ou pas, Nectar du Net et 100 000 V ont fait des billets, ce midi, pour justifier la réforme des retraites en utilisant le célèbre argument : « Le nombre de cotisants par retraité est en chute libre. Il était de 4 en 1960, de 1,8 aujourd’hui et tombera à 1,5 d’ici dix ans. »

On peut faire dire à des chiffres tout ce qu’on veut. Le nombre de gugusses qui bossait était de 20 millions en 1960. Elle est de l’ordre de 27 millions maintenant. Il y avait à peu près 46 millions de Français contre 63 millions aujourd’hui. Chaque personne travaillant nourrissait 2,3 personnes. Chaque personne travaillant aujourd’hui nourrit 2,3 personnes. La proportion est la même.

Mais qu’importe la véracité des chiffres (les méthodes de comptage de la population active ont changé en 50 ans et surtout, il est très difficile de comptabiliser le nombre de gugusses qui gagnent de l’argent avec leur travail).

Ce qui importe est d’étudier les mutations de la société depuis 50 ans avant de faire une comparaison qui ne tient pas. Il se trouve qu’il y a cinquante ans, les deux tiers des salariés était des hommes (environ 54% aujourd’hui, je crois). En français, ça veut dire qu’un homme sur deux payait tout pour le ménage, à l’époque composé de deux adultes et (au hasard) trois mômes. Un salaire nourrissait 5 personnes. Aujourd’hui, un salaire nourrit environ 2 personnes (il y a moins de mômes).

Le travailleur de 1960 nourrissait 0,25 retraités (ben oui s’il y avait 4 cotisants pour payer une retraite). Aujourd’hui un travailleur nourrit 0,67 retraités (ben oui s’il y a un salaire pour 1,5 retraites). Aujourd’hui un travailleur nourrit en plus 0,10 chômeur (j’arrondis mais on peut estimer qu’il y a environ 10% de chômeurs contre à peu près 0 en 1960).

En 1960, un travailleur nourrissait donc 5 + 0,25 soit 5,25 personnes, disons 5,2. Aujourd’hui, un travailleur nourrit 2 + 0,67 + 0,10 soit  2,7 personnes (à rapprocher des 2,3 que j’estimais par une autre méthode en début de billet).

Je reprends donc l’argument : « Le nombre de cotisants par retraité est en chute libre. Il était de 4 en 1960, de 1,8 aujourd’hui et tombera à 1,5 d’ici dix ans. » qui devient « Le nombre de gugusse à nourrir par travailleur est en chute libre. Il était de 5 en 1960, de 3 aujourd’hui et tombera à 2,5 d’ici dix ans. »

L’expression « on fait dire ce qu’on veut aux chiffres » prend évidemment tout son sens dans ma version mais encore plus dans celle des défenseurs de la réforme actuelle. Ce sont bien les mutations de la société qui comptent.

« Le nombre de gugusse à nourrir par travailleur est en chute libre. Il était de 5 en 1960, de 3 aujourd’hui et tombera à 2,5 d’ici dix ans. » Ah ! Le bel argument en faveur de la baisse du temps de travail (et la diminution de l’âge de la retraite) et pour l’accroissement du niveau de vie. Ben oui ! On nourrit moins de personnes, il devrait nous rester de l’oseille pour faire autre chose…

Il est passé où, l’oseille ?

Ah ! Tiens ! La part des salaires dans le PIB a diminué de plus de 10 points en 30 ou 40 ans. Il y a 10% du PIB en moins qui revient aux travailleurs.

C’est cette évolution-là qu’il faut inverser. Pas nous faire travailler plus.

C’est à cette seule condition qu’on retrouvera du pouvoir d’achat.

Travailler moins et gagner plus.

20 commentaires:

  1. pour mémoire :

    L'exemple d'enfumage qui aurait pu être fait en 1944, selon Bernard Friot, le voici :

    « en 1944, il y avait 15 millions de paysans pour nourrir 40 millions de Français, et comme on sait qu'en 2010 il restera 1 millions de Français pour nourrir 60 millions de Français, on peut prédire une immense famine en 2010 ».

    enfin je dis ça je dis rien http://detoutetderiensurtoutderiendailleurs.blogspot.com/2010/09/un-livre-pour-martine-lenjeu-des.html

    RépondreSupprimer
  2. Ah oui, tiens ! Je me rappelais de ça mais si tu comptes sur ma mémoire pour avoir des liens !

    RépondreSupprimer
  3. je crois que tu fais une erreur Nicolas, va voir sur mon blog

    RépondreSupprimer
  4. Val,

    Non. Tu fais des mathématiques, je fais de l'économie... Je t'ai répondu sur ton blog.

    C'est con, à droite, vous ne comprenez jamais que l'économie est un truc global.

    Alors vous posez la mauvaise équation. La seule bonne équation est : On produit tant de richesse, on en donne combien aux gens, en la répartissant comment ?

    RépondreSupprimer
  5. Bien vu !

    D'autant qu'en 2050, les Français seront 80 millions soit le pays le plus peuplé de l'Europe occidentale... Alors les projections démographiques, hein !

    Ce que personne ne nous dit, par contre, c'est que l'Allemagne a du souci à se faire avec sa courbe de natalité.

    Le plus chiant pour les gouvernants actuels, c'est que leurs concitoyens savent aussi bien pratiquer les chiffres qu'eux ! ;-)

    RépondreSupprimer
  6. Cuicui,

    Pour les Allemands, bof, si on suit mon principe, c'est un autre problème qu'ils ont : ils ont moins de mômes donc moins de bouche à nourrir. Le problème qu'ils auront c'est qu'ils n'auront pas assez de gens pour produire, à terme...

    RépondreSupprimer
  7. Gauchiste !
    Mais je suis d'accord. On fait dire ce qu'on veut aux chiffres... et c'est toujours à nuancer suivant les critères utilisés pour les études !

    RépondreSupprimer
  8. Tiens j'ai vu un reportage dans lequel on expliquait doctement qu'il y avait aussi la solution de prendre une retraite (bien méritée) mais tout en continuant à bosser mais moins (et moins payé, donc).
    En clair, on conserve une retraite symbolique mais on n'en profite pas car il faut sauver le monde !
    Mouarf !
    :-)

    RépondreSupprimer
  9. Une des choses que j'aime le moins dans les visions de gauche est celle du gâteau.
    Croire que le travail est un gâteau qu'il faut absolument diviser...
    Cette idée est celle sous jacente aux 35 heures et au retraites anticipées pour laisser place aux jeunes.

    Alors que la création d'emploi se nourrit de l'emploi et de la facilité de le créer et le détruire. Travaillons plus , licencions plus facilement, embauchons plus facilement, et il y aura plus de travail pour tout le monde ! Et donc plus de richesse ! Ah la richesse... un beau tabou à gauche... Sauf quand c'est celle des autres...

    RépondreSupprimer
  10. Lionel,

    On n'est pas d'accord, ce n'est pas grave mais tes idées sur la gauche sont ridicules car comme tout gugusse de droite, tu es incapable d'avoir une vue globale hormis de dire : Ca va marcher tout seul.

    Ceci est prouvé par le fait que ton commentaire est totalement hors sujet. Je ne parle pas de partage de travail (d'ailleurs les retraités ne travaillent pas) mais de richesses.

    Poireau,

    Oui c'est grotesque.

    Homer,

    Oui. Cette manie de démontrer n'importe quoi.

    RépondreSupprimer
  11. Pardon d'intervenir en passant : non, ce n'est pas grotesque, car le ratio nombre de cotisants sur nombre de retraités est à la base du système de répartition.

    Concrètement, le chiffre de 0,67 retraité par cotisant que vous avancez donne que les cotisations de retraite devraient représenter 67 % du salaire net des salariés, pondéré par une variable : le niveau des salaires servant de base aux retraites déjà servies. Si vous ajoutez 25 % D'autres cotisations sociales (Asurance maladie p ex), on est à 92 % du salaire. Si vous ajoutez 5 % (chiffre au hasard) de cotisation de retraite complémentaire, on atteint 97 % du revenu. En somme, il vous reste 3 % pour vivre et payer vos impôts; Ah non, je suis bête, à ce niveau-là de revenu, on est exonéré d'impôt. Quele chnce ! °S

    RépondreSupprimer
  12. Hervé,

    Merci d'intervenir.

    Si je suis ton raisonnement, ce n'est pas par deux années supplémentaires de salaire qu'on va sauver le système ! Par ailleurs, l'ensemble des cotisations représentent déjà un fort pourcentage du salaire net (entre la part patronale et la part salariale).

    Par ailleurs, le niveau des retraites n'est pas celui des salaires.

    Mais on est bien dans une problématique globale de répartition des richesses.

    RépondreSupprimer
  13. @ Nicolas

    Justement, on sait bien que la réforme actuelle ne résout qu'une faible partie du problème.

    Et il est vrai que la progression du niveau moyen des salaires éponge une partie des 67 %.

    D'après ce que j'ai entendu hier soir, c'est 65 ans qui devrait permettre le retour au strict équilibre comptable.

    Partage des richesses ? Partage de la dette, plutôt. Il est vrai que cette dette est en partie un trompe-l'œil. J'ai fait une note sur les retraites avant l'été, je pense que je vais en faire une seconde.

    RépondreSupprimer
  14. Hervé,

    Cet histoire d'âge, en fait, ne m'intéresse pas trop : c'est le nombre d'années de cotisation qui fera la différence. Je ne sais pas pourquoi tout le monde focalise sur l'âge...

    "Partage des richesses ? Partage de la dette, plutôt." Oui, je fais souvent des notes pour dire que c'est un détail. J'ai presque envie d'en faire une pour indiquer que si on partageait la dette nette entre tous les français, proportionnellement à leur patrimoine, ils ne sentiraient pas grand chose !

    Dis moi si tu refais une note (je ne peux pas avoir l'oeil partout !).

    RépondreSupprimer
  15. Elle est passée où, l'oseille
    L'oseille c'est féminin.
    Excellent article
    Je diffuse

    RépondreSupprimer
  16. "Le nombre de gugusses qui bossait était de 20 millions en 1960. Elle est de l’ordre de 27 millions maintenant. Il y avait à peu près 46 millions de Français contre 63 millions aujourd’hui. Chaque personne travaillant nourrissait 2,3 personnes. Chaque personne travaillant aujourd’hui nourrit 2,3 personnes. La proportion est la même."

    Ben non. 46/20 ça fait 2,3. Et 63/27 ça fait 3,15.

    Globalement, il y a moins d'actifs par rapport aux inactifs. Ce n'est pas forcément un problème, la productivité a augmenté. Mais la suite de vos calculs n'a aucun sens.

    La comparaison avec la productivité dans l'agriculture est par ailleurs absurde. Vous comparez des carottes et des navets, si je puis dire. Les projections des régimes de retraite tiennent déjà compte de la croissance de la productivité. Elles partent du principe que les retraités doivent en bénéficier aussi, dans la mesure du possible. L'économie ne se limite pas à l'agriculture.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Quand on ne sait pas compter, on ferme sa gueule ! 63/27 ça fait 2,333. Mais le calcul peut se faire de tête : 2 fois 27, ça fait 54. Il reste donc 9 pour arriver à 63. 9 est justement le tiers de 27.

      Par ailleurs, je ne parle pas d'agriculture. Un comptable travaille aussi pour nourrir sa famille, connard.

      Tu es un des pires imbéciles que je n'ai jamais vu sur mes blogs.

      Supprimer

La modération des commentaires s'active automatiquement deux jours après la publication des billets (pour me permettre de tout suivre). N'hésitez pas à commenter pour autant !