mercredi 3 avril 2013

Président ou Premier Ministre ?

« Que retiendra-t-on de l’émission télévisée de jeudi soir dernier et des 75 minutes d’entretien entre le Président de la Républiqueet David Pujadas ?

D’abord, fait largement ignoré, que le quinquennat produit ses effets. On avait imputé au seul Nicolas Sarkozy – qui avait bien des défauts - des changements institutionnels qui doivent beaucoup plus à la logique du quinquennat qu’au très contestable style qui fut le sien. On reproche à tort à François Hollande de se comporter en Premier Ministre, or il est désormais inscrit dans la logique du quinquennat et de la Présidence de la République que le Chef de l’Etat soit, de fait, le Chef du gouvernement.

Cette mort de fait de l’institution primo-ministérielle doit nous inciter à penser différemment l’exercice du pouvoir et à assumer que, désormais, c’est bien le Président de la République qui est en première ligne. Cesseront déjà les mauvais procès faits aux occupants de Matignon...
 » Julien Dray a fait un billet sur son blog et c’est cette introduction m'intéresse pour ce billet.

Juju a raison. Le quinquennat et, aussi, l'inversion du calendrier électoral en 2002 ont plus ou moins tué la fonction de Premier Ministre : c'est le Président qui dirige. J'ai du mal à m'y faire et je rappelle souvent dans mes blogs le rôle de chacun tel qu'il est défini dans la Constitution. La semaine dernière encore, j'en recopiais une partie ici. 

Avec Jacques Chirac, compte tenu que c'était son second mandat et qu'il avait passé une grande partie du premier comme potiche pendant la cohabitation, on n'avait rien vu. Le changement, avec Nicolas Sarkozy, a été flagrant : il était en première ligne pour tout et nous l’avons assez critiqué pour cela. J'espérais que ça allait changer avec François Hollande. C'est raté mais je pense que c'est une erreur. Par exemple, dans l’affaire Cahuzac, Jean-François Copé interpelle directement François Hollande (comme nous aurions interpelé Nicolas Sarkozy) : soit il « ne savait rien et c’est quand même extrêmement grave parce que cela signifie que lui-même fait preuve d’une certaine candeur, soit il savait et ça veut dire qu’il a menti aux Français ». Article 8 de la Constitution : « Le Président de la République nomme le Premier ministre. […] Sur la proposition du Premier ministre, il nomme les autres membres du Gouvernement et met fin à leurs fonctions. » Le Gouvernement est bien mis en place sur proposition du Premier ministre.

Pendant le quinquennat précédent, plusieurs ministres ont été touchés par des affaires. J'étais à l'époque dans l'opposition et je leur tapais dessus mais c'était bien Nicolas Sarkozy que je visais. Jamais on n’a mis en cause François Fillon pour les « turpides » de ses « collaborateurs ».

Julien Dray fait le constat. C'est ainsi, c'est bien le Président qui mène l'action du gouvernement maintenant.

J'en tirerais une conclusion différente : il faudrait que ça change et que l'on remette de l'ordre dans les institutions. 

Un exemple.

Hier, le texte sur l'acte 3 de la décentralisation a été divisé en trois lois qui seront examinées séparément par le Parlement. Je n'en sais pas beaucoup plus et je ne peux me prononcer. Si l'actualité avait été autre, ceci aurait pu faire la une de la presse (pour être précis, j'aurais voulu qu'on parle plus de cette décentralisation mais le sujet n'intéresse personne ; mes billets à son propos peinent à dépasser 200 lecteurs). 

Cette séparation en trois a été annoncée par le Président du Sénat. Depuis quand un parlementaire, si estimable soit-il, fait-il des annonces sur l'organisation des textes de lois avant qu’ils ne passent en Conseil des ministres ? Il aurait du revenir à Mme Lebranchu d'annoncer qu'elle présenterait 3 textes. A la limite, Matignon aurait pu le faire (et l'a fait mais après M. Bel). Même l'Elysée aurait pu le faire vu que le texte touche nos institutions. Pourquoi le Président du Sénat ?

Je comprends que tous ces braves gens avaient mieux à faire hier mais tout cela donne l'impression confuse que plus personne ne dirige plus rien. 

Or, c'est bien le gouvernement, donc le premier ministre, qui est en charge de préparer les évolutions de la loi et c'est au Parlement de les voter. 

François Hollande doit recadrer tout ça. Dans le cadre de son projet Présidentiel, il a souhaité cette réforme. Il a donc demandé à son Premier Ministre de la mettre en œuvre et le PM a créé un ministère pour le faire où il a nommé Marylise Lebranchu. Et c’est le Parlement qui prendra les décisions finales.

Sinon, on n'y comprend plus rien et il paiera pour tout.

S'il veut avoir une chance d'être réélu...

4 commentaires:

  1. Pour ce que j'en sais, il y aura bien trois lois différentes, à dates différentes, et en fait... personne ne sait encore ce qu'il y aura dedans, parce c'est encore complètement à préparer et négocier. Dans un sens, c'est plus démocratique qu'une loi écrite en deux ou trois jours, et votée en procédure accélérée avant qu'on sache si elle est adéquate, et même, si elle n'est pas une resucée d'autres lois qui existent déjà.

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    1. Ah ! Enfin, on peut parler d'autre chose que de Cahuzac !

      Le contenu est prêt me semble-t-il et est négocié depuis près d'un an par Marylise Lebranchu. Notamment la première partie (qui ne concerne que Lyon, Marseille et Paris, devrait être présenté au Parlement prochainement.

      Le contenu (tel que connu à ce jour) est diffusé sur le web (si tu fouilles mon blog politique, tu trouveras une adresse vers le texte de loi).

      Ce n'est pas une resucée d'autres lois. Par exemple, à Lyon, le département "disparait".

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    2. Selon une dépêche AFP que je lisais ce matin, le contenu de la troisième loi serait repris, renégocié avec un maximum d'interlocuteurs. Qu'en sera-t-il dans les faits, nous verrons bien.

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    3. Oui, j'ai vu ça, dans cet article du Monde qui explique un peu le bordel.

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